
L’addiction qu’est-ce que c’est ?
Du produit à l’addiction, comment et pourquoi devient-on toxicomane, un sportif compulsif, allant jusqu’à se blesser sans possibilité de s’arrêter ?
Un peu d’histoire
Avant de répondre à cette question il faut savoir que pendant longtemps l’addiction n’a été qu’une question de produit. C’est-à-dire qu’il fallait une substance pour parler d’addiction. D’ailleurs beaucoup de substances qui aujourd’hui sont reconnues comme nocives, ne l’ont pas toujours été. Un exemple des plus flagrants, la cocaïne a même été considérée comme un médicament. Puis les personnes consommatrices ont commencé à avoir un comportement que l’on peut qualifié « d’étrange ». Un désir de consommation pouvant pousser chacun d’entre nous jusqu’à la destruction, celle des autres mais aussi la sienne propre. Freud lui-même à été consommateur de cocaïne d’ailleurs son cancer de la mâchoire pourrait en être la résultante.
Nos contemporains
Aujourd’hui, on ne parle plus seulement de produits, on peut avoir des addictions sans substance : le sport, le sexe… la nourriture… l’autre…
Dans la pensée de la société on parle d’une forme de « victimisation », le sujet s’assujettit, il perd le pouvoir et la volonté, vis-à-vis d’un produit (pour simplification : produit ici, correspondra à tout, aussi bien les addictions sans substance qu’avec). Cette perte de volonté est dû au plaisir que le produit a procuré… Vous souvenez vous de la première fois que vous avez mangé du chocolat ? Non … votre cerveau oui, savez- vous pourquoi ? Parce que dans le chocolat il y a la même substance que dans le cannabis et qui peut rendre accro (on y reviendra).
Note : cette idée de victime volontaire peut se questionner à bien des niveaux malheureusement, pourquoi et comment devient-on une victime ?…
La volonté dans tout ça ?
Pendant longtemps, l’addiction a donc été une question de volonté et donc d’abstinence. Ce qui est très relié à l’idée de morale, mais est-ce vraiment juste ?
Nous savons qu’il y a des facteurs autres que la psychologie de tout à chacun, et donc on en est venu à parler de « maladie ». Cependant ce terme de maladie aussi est dangereux, parce que nous le voyons souvent en annonçant à une personne qu’elle est malade, elle perd le contrôle. Double perte de contrôle dans l’addiction, la personne n’a plus la possibilité de reprendre la main et souvent ne le veut pas : « c’est pas de ma faute je suis … malade ». Si je fais cette remarque c’est vis-à-vis du danger du diagnostic, il est facile de se cacher derrière ce que l’on veut ou peut pour ne pas affronter une part de notre réalité. Par ailleurs il a été démontré que plus une personne niait (dans le bon sens) sa maladie mieux elle guérissait. Dire je ne suis pas malade d’une certaine manière à tendance à vous aider.
Pour en revenir à cette question de moral, on peut se demander quel rapport le sujet dépendant a avec la vie, et, quelle valeur lui accorde-t-elle pour la malmener ?
Question : La toxicomanie (ou l’addiction) est-elle une maladie ?
Je vous pose la question, parce qu’aujourd’hui nous ne pensons plus comme cela, comme présenté plus haut. Nous le savons grâce aux découvertes de la psychologie et de la neurochimie.
Un peu d’étymologie
Il faut savoir que d’une certaine manière le terme d’addiction est très vieux est découle de la possession du corps (le votre) par un autre. Vous aviez une dette, vous étiez donné, ou plutôt votre corps était donné. Cela vient de la Rome Antique et a perduré jusqu’au Moyen Age.
Addiction vient de : addictus. Ce qui veut dire que vous êtes contraint par le corps et privé de liberté, face à une personne et finalement une substance.
Définition d’addiction
D’une certaine manière le terme addiction se définit dans son étymologie, pour le reste il sera beaucoup plus question de caractéristiques. A savoir que le sujet est :
- Dans une impossibilité de maitriser, et que cela est répétitif.
- Qu’il y a poursuite alors même qu’il/ elle sait que cela est négatif à différents niveaux.
- On parlera d’une recherche de plaisir ou d’évitement de déplaisir (interne et externe)NB : ce dernier point est un point essentiel à l’addiction, c’est la tolérance, soit le besoin d’augmentation de l’usage du produit qui plonge le sujet dans l’addiction. L’augmentation est la, pour que le sujet jouisse de la même manière que la première fois. D’une certaine manière, les gens, qui se vantent de bien tenir l’alcool, ont raison. Ils ne se vantent pas vraiment, mais il faut savoir que c’est surtout parce que leurs cerveaux sont déjà abîmés… « et oui, vos neurorécepteurs sont attaqués par la substance et du coup ils ont besoin d’une dose plus importante pour être stimulés ou pour en stimuler plus ». Dans les prises de substance, les produits s’attachent à des récepteurs qui ne sont pas les leurs et produisent des sensations. En faisant cela ils abiment le récepteur voir l’endommagent de manière irréversible. Le neurotransmetteur qui devait se câbler ne le peut plus, vous ressentez du déplaisir. Voir la gueule de bois de E-penser Dans certains cas, quand l’addiction est installé, le « manque » produit de telles douleurs que le sujet entre dans des crises de panique aussi graves et douloureuses qu’un bébé de quelques semaines qui a faim.
Il faut donc retenir les trois C :
- Comportement compulsif
- Perte de contrôle
- Poursuite malgré connaissance du mal
Consommer qu’est-ce que c’est ?
1. Usage anormal vs pathologique
2. Abus à dangers
3. Dépendance relationnelle
Il faut dans la consommation, se demander quelle est notre part de responsabilité. Pour cela une partie de nous va devoir se questionner sur notre ignorance dans la consommation. Consommer pour consommer, voilà ce que nous propose la société. Mais ne doit-on pas réfléchir à ce que l’on fait et pourquoi on le fait? … quels sont les dangers à prendre un cinquième verre ou une deuxième clope, finalement? Il y a souvent un pas entre l’ignorance involontaire et volontaire, on le voit très bien aujourd’hui avec la question du tabagisme ou de l’alcool. Et des répercussions que cela a sur la consommation d’autres drogues, que l’on se permet d’appeler, douces. L’un des mécanismes importants qui est utilisé ici, c’est la sous-estimation de ce que l’on fait et la banalisation par la suite : « c’est pas si grave, il faut bien mourir de quelque chose ». Dans la prise de certaines drogues, comme la cocaïne, avant de mourir vous pouvez avoir par exemple un cancer des voix respiratoires: c’est atrocement douloureux et vous pouvez en réchapper avec le visage défiguré. Freud a perdu la mâchoire. Cette tendance est humaine, mais montre notre incapacité dans certain à raisonner. Dans l’addiction il ne sert donc à rien de demander à l’autre de réfléchir à ce qu’il fait. Il doit y venir seul.
Le manque de verbalisation peut rapidement devenir du prosélytisme, on ne sait pas, on ne connaît pas, alors, on peut dire tout ce que l’on veut… c’est la porte ouverte à tout… Après tout pourquoi ne pas fumer un joint, puisque l’on boit un verre de vin ?… « Non, c’est pas parce que l’on se conduit bêtement que toutes les bêtises doivent être commises… » (à méditer)
LE DSM – la bible de psychiatrie
Critères diagnostiques DSM vis-à-vis de l’abus :
A. Utilisation répétée d’une substance conduisant à une altération du fonctionnement et à une souffrance clinique significative caractérisée par la présence d’au moins une des manifestations suivantes :
- Incapacité de remplir des obligations majeures (au travail, à l’école ou à la maison)
- Situations physiques dangereuses
- Problèmes judiciaires répétés
- Problèmes interpersonnels et sociaux
B. Sans atteindre le niveau de dépendance
Critères diagnostiques DSM vis-à-vis de la dépendance :
Utilisation d’une substance, altération du fonctionnement et souffrance clinique il faut au moins 3 à 4 critères sur les 7 (attention il faut faire varier les critères sur la corde normalo-pathologique du patient)
- Tolérance (besoin d’une augmentation de la quantité pour obtenir l’effet désiré/effet diminué en cas d’usage continu de la même quantité de substance)
- Syndrome de sevrage
- Quantités ou durées plus importantes que prévues
- Désirs ou efforts infructueux pour réduire ou contrôler l’utilisation dela substance
- Beaucoup de temps passé pour se procurer la substance, la consommer ou récupérer de ses effets
- Abandons ou réductions d’importantes activités sociales, occupationnelles ou de loisirs
- L’utilisation est poursuivie malgré l’existence d’un problème physique ou psychologique en lien avec le produit
Donc dans l’addiction il y a une notion de dépendance. Une phrase que je dis souvent à mes patients et qui nous permettra d’introduire le sujet dans un prochain article, est :
« être dépendant c’est une manière de ne jamais être indépendant »