Qu’est-ce qu’un couple ?

Le couple est un groupe

Selon Jean-Paul Gaillard (2009/1) le couple serait la plus petite forme de l’institution. Cela hands-437968_1920voudrait dire qu’il représenterait la plus petite unité du groupe. Pourtant aujourd’hui, le couple n’est plus véritablement reconnu pas la législation. Il est à entendre ici, que la notion de couple n’a plus la même importance que par le passé. Où il était considéré comme une alliance entre familles, villages, ou bien encore, pays. Cela a des conséquences, ce manque de considération fragiliserait le couple, dans l’organisation de ses relations. Selon Phillipe Caillé, psychiatre et thérapeute du couple et de la famille, « s’il n’y a plus de serments ou autres (rites de passages), cela engendre l’idée qu’une relation de couple constitue elle-même sa propre justification et que son existence n’a de sens que dans une perspective de durée ». Alors qu’est-ce qui obligerait 2 personnes à rester ensemble si ça ne va plus ?

Composition d’un couple

addition-jpg-20150902151254.jpg~q80,dx720y432u1r1gg,c--Le couple se compose de deux individus, c’est ce que l’on nomme la relation en mathématique, soit l’interaction entre deux éléments. Il faut que ceux-ci se découvrent des affinités dites sélectives. La relation unissant deux individus transcenderait ainsi ce que l’on appellerait « le destin individuel ». C’est l’idée, qu’une personne deviendrait membre d’un nouveau système, qui se fonde sur des choix dit mutuels, pour le bien du « gr-couple ».

Comment se structure le couple ?

L’idée de mode d’interaction la plus pertinente pour comprendre le fonctiopair-167267_1920nnement d’un couple viendrait de Marcel Mauss (1923). C’est l’idée qu’il nomme, le cycle du don. Il s’agirait de l’établissement d’une circularité oroborienne (serpent qui se mord la queue) dans la relation. Cette compréhension du couple provient de Nouvelle-Zélande, où  pour certains  peuples, il y a un cycle que l’on nomme « Hau ». Cela réside dans le fait que le don contient un fort pouvoir symbolique, et que celui-ci exige, une récompense. Celui qui négligerait ce cycle, se verrait soumis au pouvoir d’autres cycles, comme celui de la vengeance. Pour que le cycle fonctionne, il faut qu’il y ait un facteur « croyance ». Si l’on en revient à l’idée du couple et de P. Caille « aucune relation humaine ne sera s’inscrire dans la durée sans croire en un facteur transcendant qui rend naturel…».

Comment se maintient le couple ?

Mais revenons en à l’idée d’affinité sélective ou autrement nommée par P. Caillépuzzle-1020426_1920 à la collusion ou une complicité. Celle-ci impliquerait l’idée que chacun des membres du groupe ou du couple devraient accepter de ne développer que des parties de lui-même, conformes aux besoins de l’autre. Ce qui fait ici appel à l’idée de la complémentarité, ou selon beaucoup d’auteurs, ce concept peut aller de pair avec les notions d’égalité ou de hiérarchie. Dans le premier cas, cela  sous-entendrait que chacun dans le couple est différent, mais se complète. Et dans le second cas que l’un des partenaires est supérieur à l’autre. En avançant cela, on ne peut faire l’impasse sur la limite entre la soumission et l’aliénation à l’autre ou encore, entre l’autorité et le sadisme.

Dans un couple, il y a souvent l’idée d’une inégalité entre les conjoints, ce qui pose la question de savoir, d’où pourrait provenir cette inégalité dans la relation ?

Bibliographie

  • CAILLE P. (2004) : Un et un font trois. Le couple d’aujourd’hui et sa thérapie,
    Éditions Fabert, Paris.
  • Gaillard Jean-Paul, « Le couple contemporain : entre institution et connexion », Cahiers critiques de thérapie familiale et de pratiques de réseaux, 2009/1 n° 42, p. 13-25. DOI : 10.3917/ctf.042.0013

L’attachement, un détour historique pour envisager le couple

Pourquoi dit-on que tout vient des parents ? Que tout est de la faute des parents ? Que disent les chercheurs sur la question de l’attachement ? Puis qu’est-ce que l’attachement en psychologie de quoi parle-t-on ? Voilà pour vous une petite présentation sur la théorie de l’attachement, qui nous permettra d’avancer sur la question du couple.

  • René A. SPITZ

baby-203048_1280Pour envisager la théorie de l’attachement nous devons faire un détour dans l’histoire, pour s’intéresser à quelques grands chercheurs qui ont révolutionné notre conception de cette notion. Pour commencer, Il faut faire un crochet par Spitz.

D’après ce dernier, la mère acquiert au cours de la première année de vie de l’enfant le statut particulier « d’objet« . Elle n’est pas perçu objectivement, comme une personne entière. Ce serait en venant satisfaire les besoins alimentaires du bébé, que la mère ou son représentant, prendrait cette place. L’attachement se base donc sur le comportement qui va se développer entre eux. c’est ce que l’on va appeler un « prototype des relations sociales ».

  • Harry HARLOW

A la suite de Spitz, Harlow découvre que les besoins sociaux seraient primaires chez le bébé, et qu’ils se doivent d’être satisfaits de manière indépendante des autres besoins. C’est d’après ses recherches effectuées sur les animaux, comme le petit singe (ci-dessous),harlow1 qu’il a pu être constaté que le besoin de nourriture est volontairement sacrifiée, au profit de celle du contact. Selon lui le comportement d’attachement, chez le bébé, aurait pour fonction première une demande de protection. le bébé pourra progressivement se décoller de la mère en peluche pour se nourrir tout en gardant un oeil sur elle. Il y aurait donc une association entre besoin de protection et sentiment de protection. Cela sera nommé le « lien d’attachement » : « l’attachement étant l’ensemble des processus sous-jacents à la recherche et au maintien de la proximité avec une personne particulière de l’entourage de l’enfant, généralement celle à qui sont dévolus les soins à prodiguer à l’enfant…  ».

Attention : il est à  noter que l’enfant ne construit pas seulement de « working model » de sa mère. Il le fait aussi à partir des relations avec d’autres personnes de son entourage, comme le père… Le bébé ne s’attache donc pas exclusivement à la mère, il peut se lier à plusieurs personnes de son environnement avec le temps, on parlera d’une hiérarchie des liens. Les conduites d’attachement pourraient donc être différentes selon l’interlocuteur. Tout ne repose donc pas sur les épaules de la mère. Ce qui sous-entendrait que nous n’avons pas qu’un seul « prototype des relations sociales  », comme le pensait Spitz.

  • Mary AINSWORTH

Pour poursuivre sur la notion d’attachement, il faut passer par les travaux réalisés par Ainsworth. mary-ainsworth-and-babyCeux-ci permettant la mise en évidence des comportements d’attachement vis à vis de la relation entre la personne qui donne les soins et le bébé. D’après cette dernière, les comportements d’attachement se mettent en place de manière différente selon chaque enfant. cependant la mise en place de ceux-ci, sont étroitement liés aux comportements de celui qui fait ou donne le soin. Il faut savoir que tout autant que nous les adultes, les bébés aussi ont leur caractère. Ce qui veut dire que chaque parents doit réussir à s’adapter à son bébé.

Pour Ainsworth, il faudrait différencier trois types de « caregiver » (soin). Le premier type de réponse sera plutôt sensible et adapté aux besoins. Un second type que l’on nommera d’aléatoire, avec des conduites dites incertaines. Et un troisième que l’on dira intervenant ou rigide. Pour déterminer les différents types de « caregiver » (soin), les recherches se sont portées sur le degré de sensibilité du rapport entre la mère et l’enfant. Cette recherche a pu mettre en évidence, l’impact que le type de relation avait sur la formation de l’attachement pour l’enfant.  En 1978 Ainsworth a postulé, que la qualité du lien aurait une stabilité importante au cours du développement, et ce jusqu’à l’âge adulte.

  • L’attachement dans le couple, un début d’idée de liaison vers l’âge adulte

holding-hands-924942_1920Selon Michel Delage « l’homme comme être social est dans la nécessité biologique d’être en lien, pour réguler ses émotions, apaiser les circonstances stressantes de son existence, mieux penser et donner du sens à sa vie ». Le besoin d’attachement adulte n’est donc pas si éloigné dans sa conception de celui de l’enfant, Il semblerait cependant quelque peu différent mais en quoi ?  Ainsi pour l’adulte nous ne pouvons pas parler de besoin vital de protection, celui-ci pouvant subvenir seul à ses besoins comme se nourrir s’il a faim, se coucher quand il est fatigué et ainsi de suite… Nous pourrions donc parler plus d’un besoin « vital » de contact avec l’autre. Par ailleurs, le mouvement ne serait plus unilatéral, pour l’adulte, chaque individu qui compose le couple deviendrait une figure d’attachement pour l’autre, ce qui change grandement la donne.

Conclusion

Ici ce n’est qu’une présentation rapide d’une notion bien vaste en psychologie, mais c’est un début pour comprendre pourquoi nous disons que notre manière d’aimer est la résultante de la manière dont nous avons été aimé.

Bien que l’attachement adulte soit hérité de celui de l’enfance, il n’en reste pas moins qu’il peut se transformer au contact de l’autre, au sein de la relation de couple. C’est justement l’idée de bilatéralité qui est au centre de cette nouvelle forme d’attachement. Cela serait donc un processus dynamique dans le temps et organisateur de la relation elle-même. A la différence du bébé, l’adulte est indépendant, du coup il n’est plus soumis par la force des choses à l’environnement. Il faut entendre par là, que l’attachement ne s’établit plus sur une question de protection mais sur un besoin de contact. Et c’est ce besoin qui va permettre à certaines personnes de changer leur « prototype des relations sociales« . C’est comme s’il pouvait s’opérer, au contact de l’autre, un remaniement, rien ne serait donc complètement immuable, l’Homme peut changer et apprendre.

On peut souvent entendre : « avec elle/lui, il/elle a  changé… leur relation l’a  transformé », comme si ce changement était une mauvaise chose. Et si c’est le cas ne vous êtes vous jamais demandé pour qui c’était une mauvaise chose ?

Bibliographie

  • Ainsworth M. D. et Wittig B. A. (1969), Attachment and exploration behavior of one-year-olds in a strange situation, in B. M. Foss (ed.), Determinants of infant behavior, vol. 4, London, Methuen, 111-136.
  • Ainsworth M. D., Blehar M. C., Waters E. et Wall S. (1978), Patterns of attachment : A psychological study of the Strange Situation, Hillsdale, NJ, Lawrence Erlbaum Ass.
  • Harlow
  • Delage M., « Comment s’attache-t-on dans un couple ?. », Cahiers critiques de thérapie familiale et de pratiques de réseaux 1/2009 (n° 42) , p. 87-105
    URL : www.cairn.info/revue-cahiers-critiques-de-therapie-familiale-2009-1-page-87.htm.
    DOI : 10.3917/ctf.042.0087.

Comment l’amour ? Un point de vue psychologique des bienfaits de la frustration et de la mise en place de l’amour

Qu’est-ce que l’amour ? Existe-t-il plusieurs formes de ce que l’on peut appeler Amour ?

ShameDans une société autant sexualisée que la nôtre, ou des films comme Shame (2011) nous montrent tout, et mettent à nu la réalité dans toute sa splendeur, où des applications nous permettent de géolocaliser l’autre pour un « plan cul », choisi sur les critères d’une simple photo, où nous n’avons plus de place ou encore le temps d’apprécier ses imperfections, comment faisons-nous pour surmonter nos simples besoins ? et alors que nous avons tant de média pour communiquer pourquoi nous sentons nous si seul ?
Nous pouvons nous interroger sur l’idée de comment se construit véritablement l’amour. La question serait de savoir, s’il n’est pas le résultat de l’attente frustrante face au besoin sexuel que l’on a envers une autre personne ? Il faut entendre par là, l’idée que pour créer les fondations véritables d’un couple, il y aurait un besoin d’une « dose » de frustration.

D’après C. David (1996) ce qui rassemble les différentes formes d’amour dont tout le monde parle, Ce serait ce que l’on appelle la libido. L’amour, n’aurait pas de carburant pour avancer, ni la propulsion nécessaire et suffisante pour être créatrice de quelque chose, sans cette étincelle qui serait le besoin sexuel. L’amour s’étayerait donc en premier sur notre corps et en second lieu dans notre esprit, en sommes nous certains ?

En premier sur notre corps et En second dans notre esprit

Dans un texte de V. Jadoulle (2004) nous pouvons lire une explication de l’état amoureux comme ceci «  une impression de changement du sentiment de soi, de son corps et du monde perçu, le surinvestissement de l’imaginaire et la négligence des données et des exigences du réel, une surestimation de l’objet aimé, une dépendance étroite à celui-ci avec un rétrécissement du champ relationnel et perceptif, ainsi que l’envahissement de la pensée par la représentation de l’être aimé ». Quand on parle d’amour la plupart du temps, on parle en réalité des débuts de la passion. Nous nous retrouvons d’ailleurs tous, plus ou moins bien dans cette description. Ce sentiment grisant de se perdre en l’autre. Cette sensation de ne plus vouloir se séparer de lui. Nous oublions nos réalités personnelles, nos contraintes de tous les jours et nos emplois du temps si chargés deviennent d’un seul coup plastiques, jusqu’à un point de jonction ou de rupture (nous aborderons ce sujet dans un prochain article).

L’état amoureux passerait donc d’abord par « la file_main_image_11777_1_lettre_bebe_maman_11777_01_1500X1000_cache_640x360recherche du paradis perdu », de la petite enfance. Nous savons que l’amour s’étayerait dans un tout premier temps sur une fusion entre le bébé et son monde. Ce serait la rupture de cette fusion qui serait à l’origine de la perte du paradis (voir article sur l’attachement).

La relation entre la mère et son bébé évoluant, il doit normalement arriver un temps entre la demande impérieuse du corps de l’enfant (faim, sommeil, …) et la réponse. Nous parlerons ici d’une mère dite « suffisamment bonne et frustrante ». Ces qualités mises en action, doivent permettre à l’enfant de se dissocier d’elle. C’est la possibilité de frustration de la mère envers son enfant, qui permet de ce fait la formation de « l’imaginaire originaire », donnant la possibilité à l’enfant, mais aussi à l’adulte, d’appréhender et de survivre à l’état de manque dû à ses besoins (en premier lieu).

Qu’est-ce que la frustration aujourd’hui dans notre société?tinder

Rappelons-le aujourd’hui les applications, que l’on retrouve sur nos portables, nous permettent de choisir l’autre comme on choisit son jambon, et dans la foulée d’être dans son lit, en un click. Nous pourrions donc envisager ici, que la société ne laisse plus le temps aux gens de développer cette zone si fragile entre le corps et l’esprit. Cette zone qui selon nous, serait l’épicentre du sentiment d’amour naissant entre deux êtres. Ce temps qui disparaît aujourd’hui s’appuyait, selon nous, sur la frustration elle-même, entre le besoin et le désir. Il n’y aurait donc plus de place pour ce temps créateur, cela empêchant le rêve et le fantasme de se développer, au profit de l’idée actuelle de l’avoir et le posséder.
L’idée même de l’amour telle que nos ancêtres la voyaient, serait-elle vouée à disparaître au profit de la passion ?

Comment ptraffic-lights-514932_1920ouvons-nous encore l’appliquer pour la création d’un couple ? Est-ce que ce serait ce que dans les magazines, certains journalistes appellent la règle des trois ? En 1. vous rencontrez quelqu’un et vous allez prendre un café, puis en 2.  vous allez au ciné pour un second rendez-vous, et enfin en 3. le fameux resto, est-ce cela la frustration aujourd’hui ? Cette attente, même minime, pourrait-elle donc faire naitre un désir plus solide envers l’autre, nous permettant de lui donner une identité désirable, mais aussi à la fois désirée ?

Conclusion

Notre société perdue dans les méandres de la consommation, nous laisse à entendre qu’il ne faut plus attendre. Posséder devient une nécessité de notre siècle, et cela semble avoir des répercussions sur notre mode, même, d’être au monde.
L’amour serait en deux temps, ou à deux vitesses. Un premier temps de fusion, que nous appelons finalement la passion. Ce premier moment où comme dans l’enfance il n’y a plus d’espace ni de temps entre l’autre et nous. Puis un second temps où viendrait inexorablement l’instant ou nous reprenons conscience de nous même. Et ce serait à partir de là que le couple pourrait se construire et le véritable amour apparaitre.

Étape qui est compliquée pour chacun des couples qui se sont créés sur la passion, sans attendre, imposant sur ce qu’ils vivent le mot d’amour. Sur cette dernière, la passion, il n’y a aucune base, aucun manque, aucune frustration.
Nous l’avons montré, la frustration finalement permettrait d’envisager l’autre non plus comme le sujet de notre passion mais comme l’objet de notre amour. La frustration nous permet d’appréhender l’autre, comme une personne à part entière. Ce temps nous donne la possibilité de nous soustraire de nos besoins, de nos fantasmes, de nos désirs passionnels, et d’apprendre à connaître tout simplement la personne assise en face.
Pourquoi dans les relations passionnelles cela ne se passerait pas pareil me direz-vous ? Tout simplement parce que dans la consommation de la chaire l’autre n’existe que dans la satisfaction. Et à ce moment-là pouvez vous honnêtement dire que vous connaissez l’autre, ou n’est-il que le reflet de votre imaginaire ?

Bibliographie

  • Athanassiou, C. (1986). Déni et connaissance. Revue Française de Psychanalyse, a soi même étranger (Déni, désaveu), 4, 1125-1144.
  • David C. (1996). Post-scriptum à l’état amoureux. Revue française de psychanalyse n°60/1996, p. 633-642
  • Jadoulle V. (2004). Quelques enjeux inconscients de l’état amoureux, Cliniques méditerranéennes, 2004/1 no 69, p. 127-138.

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